C'est désormais prouvé: contre les maladies cardiovasculaires dues au stress, la relaxation et les thérapies comportementales sont efficaces.
Pratiqué régulièrement, le yoga, entre autres disciplines, favorise le bon fonctionnement cardiaque.
Près de "40000 infarctus mortels chaque année"! Tel est, selon Marcel Goldberg, épidémiologiste et professeur de biostatistique, le prix du stress dans notre pays. Loin d'être une vague comptabilisation "au doigt mouillé", ce chiffre provient d'une gigantesque étude, menée dans sept pays et parue en 2012 dans la revue The Lancet. Les chercheurs ont observé durant vingt ans la situation de 200000 Européens et, surtout, l'évolution de leurs conditions de travail.

A lui seul, le stress augmente de 25% le risque relatif de survenue d'un infarctus. Ses effets sur l'organisme sont bien identifiés - tachycardie élevée, vasoconstriction (resserrement des vaisseaux sanguins), "sidération" du myocarde, troubles du rythme ventriculaire, autant de réactions physiologiques délétères pour le coeur, "qui consomme brutalement trop d'oxygène, et dans de mauvaises conditions", explique le Pr Jean-Paul Bounhoure, de l'Académie de médecine. Avec des conséquences parfois quasi immédiates.
Le stress chronique, plus insidieux, fait tout autant de dégâts, notamment chez certaines personnes prédisposées génétiquement. Il modifie le système nerveux parasympathique, favorisant "le mauvais cholestérol, l'obésité, l'artériosclérose et même le dysfonctionnement du rein", détaille le Pr Claire Mounier-Vehier, chef de service de cardiologie au CHU de Lille. Parmi les sujets à risque, on trouve les "râleurs", les introvertis, les obsessionnels, bref, les personnes dites "de type A" ne parvenant pas à exprimer leurs émotions, ajoute-t-elle.
D'où l'intérêt des activités physiques (jogging, natation, vélo) qui vident l'esprit - dès lors qu'elles sont pratiquées de façon intensive -, mais aussi des thérapies de pleine conscience qui activent l'hypothalamus et le tronc cérébral. Quelle que soit la méthode employée (yoga, sophrologie, tai-chi...), toutes les techniques de relaxation favorisent le bon fonctionnement cardiaque. "A condition, cependant, de les pratiquer régulièrement et sérieusement", prévient le Pr Bounhoure. Car les liens entre coeur et cerveau ne font plus de doute : "Le muscle cardiaque contient environ 100000 cellules neuronales", rappelle le Dr Frédéric Kochman, psychiatre à la clinique Lautréamont de Lille. Sous le coup de diverses émotions, ces deux organes sont donc en interaction étroite.
Un poisson rouge pour réguler la tension artérielle
Mieux encore, l'interaction entre l'esprit et le corps par le biais des thérapies cognitivo-comportementales (TCC) appliquées aux pathologies cardio-vasculaires est objectivable. "Jusque-là, on se disait que les TCC ne pouvaient pas faire de mal. La nouveauté, c'est que leur efficacité est désormais prouvée scientifiquement, en seulement quatre semaines", assure le Dr Kochman. Ce médecin propose des séances hebdomadaires de "cohérence cardiaque" en petits groupes : le patient suit sur l'écran les déplacements d'un poisson rouge (virtuel), qui monte ou descend en fonction de sa respiration.
Lorsque son souffle s'apaise grâce à des exercices de relaxation, il peut ainsi en visualiser les effets sur l'écran. "C'est comme un jeu vidéo mental", glisse le Dr Kochman. En vingt minutes, les tensions s'apaisent et le coeur se relâche. Ne reste plus, ensuite, qu'à pratiquer cette méthode en individuel, chez soi ou au travail. "Cinq minutes de respiration cadencée suffisent à faire baisser, de façon mesurable, la tension artérielle. Et l'effet dure pendant six heures", assure le Pr Mounier-Vehier. A vos poumons !
Par Vincent Olivier, Article de l'Express du 29/09/2014